Chap. 3: “Singing - A New Kind Of Hustle”

Chapitre 3 :

SINGING – A NEW KIND OF HUSTLE
Premières scènes et premières amours

 

C’est dans ce chapitre que tout commence à se mettre vraiment en place dans la tête de Cab : musique + entertainment = succès + argent ! La formule sera celle qui l’animera toute son existence désormais.

Sa mère l’ayant entendu chanter convint qu’il avait une belle voix et que quelques cours de chant le mettraient sur la bonne voie, c’est-à-dire loin de la rue et de ses petits caïds… Ruth Macabee fut sa professeur, lui instillant le respect des gammes et de l’élocution – deux des points forts vocaux de Cab ! Pourtant, Ruth lui interdit de chanter du jazz… le destinant à une carrière classique.

Au lycée, il continua de prendre des cours et d’améliorer ses vocalises. Et de ses contacts avec la rue, Cab put pour la première fois chanter dans un des clubs de Baltimore, le Gaiety, accompagné du pianiste local. Il donna une interprétation si  bonne du tube du moment, Muddy Waters, qu’on le surnomma ainsi. Gaiety, Bailey’s ou Arabian Tent, tous ces clubs permirent à Cab de se faire la voix et une petite célébrité locale, tout en étant au lycée. S’il n’était pas autorisé à chanter là à son âge, les professeurs qu’il croisait dans ces clubs où l’on revendait de l’alcool prohibé n’avaient aucune raison d’y être non plus. Un accord tacite permit donc aux deux partis de prolonger ce modus vivendi.

 

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Cab, batteur-chanteur avec un pianiste à 12 doigts !

Témoignage de la vie locale, l’autobiographie de Cab donne un aperçu de l’histoire du jazz à Baltimore. Johnny JONES (qui avait 6 doigts à chaque main !), Eubie BLAKE et Chick WEBB étaient d’ici. Ce dernier fut l’inspirateur de Cab qui voulut devenir un batteur-chanteur. C’est encore un coup du destin qui poussa Cab à devenir batteur, en remplaçant au pied levé d’un batteur dans un groupe du coin. Pour compenser, Cab se mettait à chanter. Il ne tarda pas à s’imposer comme leader du groupe. Ils jouèrent dans les clubs et restaurants de Baltimore.

Cab rejoignit ensuite l’orchestre de Johnny JONES du Arabian Tent Club. On passe alors à 10 musiciens et Cab enchaîne les représentations dans ces lieux interlopes. C’est là qu’il commence à bien pratiquer l’alcool (surtout de contrefaçon). Il commençait à gagner entre 30 et 35 dollars par semaine, une bonne somme pour l’époque – et pour ses 17 ans !

Ses succès sur scène entraient en compétition avec ses capacités sportives (le basket-ball comme le football américain – mais là il essuya une adversité redoutable qui l’envoya à l’hôpital pour trois jours) au point que Cab hésita un moment entre les deux avenirs. Sa dernière année au lycée, Cab joua professionnel au basket avec l’équipe des Athéniens de Baltimore. A lire Cab, c’était le meilleur (en toute modestie !!). Après les matchs, il enchaînait les tours de chant. Ses revenus augmentaient d’autant (en plus des 10$ par match) mais il en faisait toujours profiter sa mère et sa famille.

 

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La ségrégation en toile fond.

Un des passages de ce chapitre met en avant les effets néfastes de la discrimination. Il précise qu’à cette époque, pour parler d’un Noir, on disait « Negro ». « Black » était alors une insulte, insulte d’autant plus forte pour Cab qui avait la peau particulièrement claire. Si jamais quelqu’un lui demandait s’il avait du sang de Blanc dans les veines, il répondait : « Il y a bien eu un nègre dans le temps qui a sauté la barrière et alors quelque chose s’est passé… » S’appuyant sur cette réplique, Cab explique que bien des Blancs ne sont pas aussi blancs qu’ils le disent et que quelqu’un à un moment ou un autre a également sauté la barrière…

Si Cab déclare assumer pleinement sa négritude et la revendiquer, il précise que la seule différence entre un artiste blanc et un artiste noir, c’est le nombre de coups de pied au cul qu’ils ont reçu chacun ; et que le sien en a reçus un peu plus que la moyenne…

Cab explique également que le mixage social était plus fort – et surtout plus spontané – à Baltimore quand il était gamin. Cab donne en exemple deux anecdotes, dont celle du concert de Lionel HAMPTON à Kansas City, mais également la fois où une connaissance leur prêta sa maison à Lido Beach, en 1943. Un soir que lui et sa femme Nuffie revinrent y dormir après un concert, il furent accueillis par des pancartes « Nigger, go home », « We don’t want niggers in Lido Beach ». Ce qui n’empêcha pas Cab de s’installer pour une douzaine d’années dans cette maison et d’avoir de très bons amis parmi ses voisins.


Premier enfant avant ses 18 ans.

Cab termine ce chapitre par l’aveu d’une « erreur de jeunesse » commise à 17 ans. Cab sortit avec Zelma PROCTOR, petite briseuse de cœurs locale. Chacun des deux y perdit sa virginité (ne m’accusez de voyeurisme, c’est Cab qui l’avoue lui-même !) et y trouva le grand amour. Evidemment, Zelma tomba enceinte. Refusant de se marier, elle voulut pourtant garder l’enfant. Alors enceinte de sept mois, Zelma quitta Baltimore en compagnie de Cab pour New York. Ils s’arrêtèrent à Atlantic City. Là, Cab connut un petit succès qui leur permit d’envisager l’avenir avec plus de sérénité. Pourtant, Zelma décida de partir seule pour New York. C’est donc seule que Zelma donna le jour à Camay Proctor le 15 janvier 1927. Cab envoya régulièrement de l’argent à Zelma pour l’aider à élever Camay.

Camay et son mari Booker Brooks eurent deux enfants, Peter et Christopher Brooks. C’est ce dernier qui reprit le flambeau de l’orchestre de Cab et qui depuis quelques années tourne dans tous les Etats-Unis sous le titre de « Cab Calloway Orchestra ». Quelques histoires de famille compliquées viennent évidemment noircir le tableau quant à l’utilisation du nom de Calloway (un procès eut même lieu en 2000 et encore un début 2007). Tout cela n’apparaît pas dans le livre de Cab qui, fort heureusement pour lui, mourut avant tous ces désagréments. Nous essaierons toutefois d’y revenir prochainement. Pour autant, Cab semblait considérer Camay et tous ses enfants comme sa propre famille.


Cab Calloway, Of Minnie The Moocher And Me
Dans le prochain chapitre, From Baltimore To Jazz City: Chicago,
nous aborderons les premiers pas de Cab
dans la revue Plantation Days et son arrivée à Chicago...

 

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