Chap. 6: The Cotton Club and the World



THE COTTON CLUB and THE WORLD

Ça y est : Cab et les Missourians sont les nouvelles vedettes du Cotton Club : très rapidement, leur popularité grandit et ils prennent de plus en plus d’importance dans la vie nocturne de New York comme sur les ondes radio dans toute l’Amérique.

La montée en puissance de Cab et des Missourians se fait en parallèle d’un mouvement plus ancien et plus « intellectuel », celui de la Renaissance de Harlem auquel participent de nombreux poètes et écrivains noirs : Langston Hughes, Claude McKay, etc. Si Cab reconnaît s’être senti en phase avec ce mouvement, il admet toutefois y être complètement étranger comme l’était d’ailleurs tout l’univers noir de l’entertainment.

Cab Calloway and his Missourians
L'orchestre des Missourians

Revenons au Cotton Club. Les Missourians y remplacent Duke dès qu’il part faire un concert à l’extérieur mais ce fut à partir de l’été 1930, lorsque les Ellingtonians partirent tourner à Hollywood que Cab et son orchestre purent jouer plus longtemps. Duke revint du mois de septembre à fin octobre et quand les Missourians remontèrent sur la scène du Cotton Club à Thanksgiving, les choses changèrent d’un jour sur l’autre. Herman Stark convoqua tout le monde et dit : « A partir d’aujourd’hui, c’est Cab votre chef et notre interlocuteur. C’est lui qui vous paiera et c’est à lui que vous rendrez des comptes. » Même si l’esprit de coopérative n’était déjà plus tellement présent chez les Missourians, certains des musiciens eurent du mal à avaler la pilule. Mais pour l’orchestre, les changements avaient commencé dès l’été avec les recrutements successifs de nouveaux musiciens : Benny Payne au piano tout d’abord, Ruben Reeves et Pike Davis à la trompette. Quelques mois plus tard, ce sera le tour d’Ed Swayzee, Doc Cheatham. Bref, les mauvaises langues diront que Cab fit tout pour briser les anciens Missourians en les diluant avec de nouveaux musiciens et afin d’asseoir définitivement son pouvoir.

Cotton Club ParadeCab n’en revenait toujours pas de tout cet argent qu’il gagnait. Il faut dire que la nouvelle revue de l’automne 1930 était un succès, que la radio retransmettait trois fois par semaine les concerts en direct, que dès le mois de mars 1931, ils enregistrèrent leurs premiers disques, etc. Quand ils ne jouaient pas au Cotton Club, ils faisaient la tournée des théâtres entre New York et le New Jersey. Aussi, afin de rentabiliser encore plus l’orchestre (et éviter à Cab de payer trop d’impôts !), et sur les conseils avisés d’Irving Mills et d’Herman Stack, Cab Calloway devient une entreprise, la Cab Calloway Incorporated. Dans cette société, Cab détenait 50 %, Irving Mills 25 % et Duke Ellington 25 %. Eh oui, Duke avait beau être un gigantesque compositeur, il n’en était pas moins avisé ! La société versait un salaire de 500 $ par semaine à Cab et ce dernier touchait 50 % des bénéfices en fin d’année. En pleine Dépression, notre ami Cab touchait la bagatelle de 26 000 $ par an et autant en dividendes !
Pourtant, côté cœur, l’idylle entre Cab et Betty tourne déjà au vinaigre. Elle souhaitait grimper dans la société tandis que Cab voulait continuer à mener sa vie de Bohème et d’artiste, allant de clubs en clubs. Quelques pages plus loin, Cab précise qu’en dehors de la tournée européenne durant laquelle elle accompagna Cab (et le trouva en fâcheuse posture dans les toilettes d’un cabaret parisien), Betty ne suivait plus la vie de Cab et de l’orchestre.

Le grand déclencheur dans la carrière de Cab eut lieu au printemps 1931 lorsqu’il composa avec son agent Irving Mills la chanson « Minnie The Moocher ». Chaque orchestre à l’époque avait sa chanson-thème. Duke avait « Mood Indigo » par exemple. Les Missourians et Cab devaient se contenter d’un blues traditionnel, « Saint James Infirmary » popularisé par Louis Armstrong dans les années 20. Comme ils avaient plus le sens des affaires que de la musique,Minnie The Moocher, Cab Calloway Mills et Calloway imaginèrent une rengaine calquée sur St James Infirmary. Côté paroles, ils s’inspirèrent largement de la chanson Willie The Weeper que Cab admet avoir pillé. Il y avait également une chanson intitulée « Minnie The Mermaid ». Grands « mixeurs » devant l’Eternel, ils « créèrent » donc « Minnie The Moocher ». C’est au saxophoniste Walter Foots Thomas qu’échut le premier arrangement. Il était arrivé dans les Missourians en 1929, juste avant l’arrivée de Cab. Il resta dans son orchestre jusqu’en 1943 !
Toujours d’après la légende (et d’ailleurs que serait l’histoire du Jazz sans quelques bonnes histoires incroyables comme celle qui va suivre), le côté « Hi-de-Ho » vint un peu plus tard, alors que leur spectacle était retransmis en direct à la radio, Cab eut un trou de mémoire et se mit « soudain » à remplacer les paroles par « Hi-de-hi-de-hi-de-ho ». L’orchestre reprit en chœur, et petit à petit le public se mit de la partie, galvanisé par l’ambiance. Le lendemain, ils étaient submergés de courrier réclamant à nouveau cette chanson.
Cab reconnaît volontiers qu’il n’est pas l’inventeur du Scat. Louis Armstrong était son scatteur favori, mais il y en avait bien d’autres. Pour cela, reportez-vous à la fabuleuse Anthologie du Scat en 3CD dirigée par l’éminent Philippe BAUDOIN et parue chez Mélodie.
Si l’on écoute également un peu plus ce qui se faisait alentours, on se rendra compte que Blanche CALLOWAY, la sœur aînée de Cab avait enregistré quelques mois plus tôt un titre dans lequel elle chantait déjà « Hi-de-hi-de-hi-de-ho »… A bon entendeur.


Irving Mills et Cab Calloway + Chick Webb
Irving Mills entouré de ses protégés : Cab Calloway, Duke Ellington et Chick Webb


Quoi qu’il en soit, Minnie The Moocher ferait désormais partie intégrante de la vie de Cab et vice-versa. Cab écrivit plus d’une centaine de chansons depuis, mais aucune d’elle n’eut autant de succès (même « Jumpin’ Jive » qui se vendit à plus d’un million de 78 tours à l’époque !).
Cab explique ensuite l’origine des quelques tubes comme The Lady With The Fan, That Man is Here Again, Good Sauce From The Gravy Bowl, Are You in Love With Me Again, Zah Zuh Zah. Nous y reviendrons dans des notes spécialement dédiées.
Cab reconnaît que c’est son agent Irving Mills qui l’a poussé à écrire autant de chansons. Il n’avait vraiment plus rien à voir avec son premier agent Moe Gale dont Cab se sépara définitivement au printemps 1931. Irving Mills était plus qu’un agent ; c’était un véritable homme d’affaires sur lequel d’ailleurs courent de nombreuses rumeurs. On dit que Duke – dont il était également l’agent – se fâcha avec lui lorsqu’il se rendit compte du déséquilibre du contrat qui le liait à lui depuis tant d’années. Irving Mills, tout blanc qu’il était, fit beaucoup pour la cause noire, en mettant en valeur les qualités de tous les artistes sous contrat avec lui, permettant notamment à Duke Ellington d’être le premier orchestre noir à apparaître dans un film à gros budget et ce, dès 1930.
 

Cab Calloway's Hepsters Dictionary
Le dictionnaire du jive de Cab Calloway (édition de 1944)

Il apparaît également que Cab Calloway était un véritable catalyseur de l’argot de ses contemporains. Au point d’ailleurs que Cab sortit de 1938 à 1944 plusieurs éditions du Cab Calloway Hepster’s Dictionary. En parallèle Cab publia « Professor Cab Calloway Swingformation Bureau » qui permettait de mettre en pratique les leçons du grand dictionnaire de jive. Côté chanson, ce fut la grande époque du Jumpin’ Jive, Are You All Reet?, etc.


Cab Calloway, Census / Recensement New York 1930
Cab et Betty apparaissent dans le recensement de New York en 1930 :
lui chef d'orchestre, elle, danseuse.

A l’automne 1931, Cab et Betty profitèrent de l’augmentation de leur niveau de vie pour quitter la pension des Henderson. Ils choisirent de s’installer sur la 7e avenue dans les immeubles Dunbar. Pour autant, ils n’avaient pas encore les moyens d’un loyer tout entier ; ils co-louèrent donc avec une famille durant une année et purent enfin s’installer ensuite dans un des plus beaux quartiers de Harlem à l’époque, à l’angle de la rue Saint Nicholas et de la 138th rue. Bon, si on suit Cab dans son texte, on se perd un peu question chronologie : il décale un peu la période durant laquelle ils habitèrent aux abords de St Nicholas Park à 1934-1937. C’est en tout cas en 1937 que les Calloway emménagèrent dans une maison construite sur les plans de Betty à Riverdale dans le nord du Bronx. Le premier problème, c’est qu’il s’agissait d’un quartier totalement blanc dans lequel un Noir, même célèbre comme Cab, n’était pas le bienvenu. « Niggers go home » fut le message d’accueil qu’ils trouvèrent sur leur pelouse le jour de leur arrivée… Difficile d’envisager un barbecue entre voisins !
Cab regrettait amèrement Harlem pour lequel il vouait un amour profond. Il y avait rencontré un noctambule qui allait devenir un de ses meilleurs amis et compagnons de boisson : E. Simms CAMPBELL. Premier dessinateur noir au prestigieux journal Esquire, dont il dessina le logo, il créa une célèbre série de cartoons sur la vie au harem. Dans un cartoon d'octobre 1934 paru dans Esquire justement, campbell cita son ami Cab à propos d'un chœur de Blancs dans une église avec un seul Noir auquel le curé s’adresse : « And none of that hi-de-ho stuff. »

Cab Calloway autobiographie. Dessin de Harlem par E. Simms Campbell
 
C’est Campbell qui dessina la superbe et fort drôle carte de Harlem qui illustre les pages de garde de l’autobiographie de Cab (je ne suis jamais parvenu à trouver une copie de cette illustration présentée ci-dessus. Si vous avez des informations, n’hésitez pas !). Campbell resta l’ami de Cab jusqu’à la fin de ses jours en 1972. Il habitait alors la Suisse où il s’était retiré en 1957, avec sa seconde femme (la petite sœur de sa première épouse décédée). Cab considère Elmer Simms Campbell comme son meilleur ami.

Cab Calloway on Mutual RadioAprès cette longue digression, Cab reprend le cours du récit de sa carrière musicale.
En septembre 1930, lorsque Duke Ellington revint d’Hollywood, Irving Mills organisa une tournée pour Cab et les Missourians dans la région de New York qui dura jusqu’à la prochaine revue du Cotton Club. Le succès, on l’a déjà dit, fut rapide, notamment grâce à la radio qui retransmettait les shows en direct du Cotton Club, trois soirs par semaine. Les lundis, mercredis et vendredis, Ted Husing annonçait avec entrain « Cab Calloway and his Cotton Club Orchestra ! » et toute l’Amérique écoutait avec délice les refrains du moment.

Après cette saison riche en succès, Irving Mills organisa avec l’aide d’une bienfaitrice blanche et discrète (Mrs. Knowles) une tournée de l’orchestre dans le Sud profond des Etats-Unis. C’était la première qu’un orchestre noir allait mettre le pied avec force publicité dans des états où tuer un Noir simplement parce qu’il avait regardé quelqu’un de travers était chose courante… Quelques-uns des musiciens originaires du Sud étaient plus que réticents à partir là-bas.
Et pourtant, ils jouèrent un peu partout, dans des salles grandes comme Madison Square Gardens, mais aussi des entrepôts, des granges, des salles de danse, etc. La plupart des salles séparaient le public noir du public blanc par une corde, et parfois, la soirée était elle aussi divisée en deux : la première pour les Blancs, la seconde pour les Noirs.

Cab CAlloway's orchestra 1932

L’orchestre voyageait dans les bus appartenant à la compagnie de Mrs Knowles, ce qui constituait un abri dans des villes plus qu’hostiles (en tout cas avant et après les concerts). Un jour au péage en Virginie, le contrôleur demanda aux policiers de faire descendre cette vieille dame blanche perdue au milieu d’un bus rempli de Noirs. Le scandale qui s’ensuivit retarda l’orchestre qui devait se rendre à Virginia Beach. C’est là que Cab et son pianiste Benny Payne étaient arrivés en voiture quelques heures plus tôt. Pour calmer le public impatient autant qu’hostile, ils entamèrent un mini-tour de chant lorsque quelqu’un s’écria : « Sortons ces Nègres d’ici et lynchons-les ! » Heureusement pour eux, l’orchestre arriva quelques minutes plus tard. Immédiatement après la fin du spectacle, ils replièrent bagages et quittèrent la ville aussitôt. Rien à voir avec le traitement auxquels ils avaient droit au Cotton Club ! Certains soirs, la police était obligée de les escorter pour les conduire jusqu’à la salle ou en fin de soirée jusqu’à leur bus. Et chaque jour, ils devaient se contenter des toilettes et des restaurants réservés aux Noirs.

Benny Payne dans l'orchestre de Cab CallowayLes anecdotes à propos de cette tournée sont nombreuses et Cab ne nous lasse pas d’en narrer plusieurs, comme celle du concert payés en petite monnaie, mais aussi celle où le batteur Leroy Maxey reçut une bouteille sur le front, lancée du public par le fils du shérif local. Une autre fois à Miami (où seul auparavant Bill Robinson avait joué quelques mois plus tôt), alors que la police avait tendu des cordes pour empêcher les Noirs et les Blancs de se mêler, des amis gangsters de New York vinrent leur rendre une visite amicale. Le problème, c’est qu’ils se comportaient comme à New York, se mêlant aux Noirs et surtout – comble d’horreur ! – une des femmes blanches alla embrasser Benny Payne sur scène. Les musiciens arrêtèrent de jouer, les spectateurs de danser. C’est la police qui intima à Cab de reprendre la musique illico afin de sauver leur peau.
Cab raconte que lors de leur deuxième tournée dans le Sud, les techniciens se mirent en grève, refusant de travailler pour un orchestre noir. Cab s’approcha de celui qui semblait être leur chef. Il lui paya un coup. Les autres s’approchèrent et profitèrent des tournées successives auxquelles participait Cab. A la cinquième, tout le monde était saoul et hilare et après quelques explications vaseuses, les techniciens se remirent de bon cœur au travail.

The Singing Kid avec Al Jolson et Cab CallowayA leur retour du Sud, Cab Calloway et les Missourians furent accueillis en véritable héros par l’équipe du Cotton Club. Ils enchaînèrent sur une « petite » tournée dans aux alentours de New York. Ce fut le moment que Cab choisit pour demander à tourner dans son premier film, à Hollywood. Nous en avons déjà parlé dans cette note sur le tournage du film The Singing Kid (attention néanmoins, une fois de plus, Cab a une chronologie un peu brouillone et erronée : la première tournée dans le Sud eut lieu en 1932 et le tournage du Singing Kid eut lieu en janvier 1936 !).

Au retour de la Californie, Cab continua avec la nouvelle revue du Cotton Club et les tournées autour de New York. I’ve Got The World On A String, Minnie The Moocher’s Wedding Day étaient quelques-uns des succès présentés au public et co-signés par le duo Ted Koehler et Harold Arlen. De 1932 à 1934, la vie de l’orchestre de Cab s’organisait autour de la revue du Cotton Club, des concerts dans la région de New York et de la côte Est, le tout agrémenté de deux tournées nationales par an. L’été était consacré au Midwest.

Bill Robinson et Cab Calloway, Cotton Club
Bill Robinson et Cab Calloway en répétition (1936)
Ben Webster est le saxophoniste à droite de l'image

Parfois, l’orchestre se rendait à la prison de Sing-Sing dans l’état de New York pour aller détendre quelques amis des propriétaires du Cotton Club, emprisonnés sans doute injustement.

Cab explique qu’il n'a jamais aimé faire les concerts caritatifs, même s’il en a joués des centaines. Il estime que malgré tous les efforts de chacun, on ne voit jamais de résultats probants. Un jour que le célèbre tap dancer Bill ‘Bojangles’ ROBINSON lui demanda de participer avec son orchestre à un concert pour aider les proches d’un artiste noir décédé, Cab refusa tout net. Cab décrit d’ailleurs Bill Robinson (doux comme un agneau à l’écran – souvenez-vous de lui dansant avec Shirley Temple ou encore dans Stormy Weather) comme un être vulgaire et violent, toujours armé. Ce jour-là, Bill lui promit de briser sa carrière s’il refusait. S’ensuivit une bagarre entre les deux hommes au terme de laquelle ils devinrent d’excellents amis. En tout cas, c’est ce que Cab affirme. Cab se remémore les concerts caritatifs qu’il donnait chaque Noël pour les pauvres de Harlem. Chacun faisait don d’une semaine de paie pour remplir des paniers de dindes et plats cuisinés à distribuer.

Un des pics de la carrière musicale de Cab Calloway au Cotton Club fut pour lui la tournée européenne organisée en 1934. Nous en avons longuement parlé dans une note inspirée en partie de ce que Cab écrit dans ce chapitre, avec un comparatif intéressant de la vision des mêmes événements par l’humble trompettiste Doc Cheatham.

Cab Calloway, programme 1932

A leur retour d’Europe, Cab et son orchestre passèrent par le Cotton Club avant de partir en tournée au Texas. Ils y furent accueillis en fanfare, paradant dans toute la ville. Le public fut encore plus nombreux qu’auparavant. Ils donnaient quatre shows par jour, tous complets. Toujours précis quand il est question d’argent, Cab note que les recette allaient entre 65 000 et 75 000 $ par semaine, pour un prix des places entre 1$ et 1,50$ pour le soir et cinquante à soixante cents pour les shows en matinée. Houston leur réserva un tel accueil qu’ils durent faire un cinquième show quotidien, à minuit ! Alors que la ségrégation n’autorisait pas habituellement les Noirs à avoir des places en mezzanine (le balcon plus haut leur était destiné), les directeurs des salles leur ouvrirent ces emplacements. Comme le commente ironiquement Cab, 10 000 $ de profits supplémentaires feront toujours beaucoup contre la ségrégation !
Il faut reconnaître que les Noirs texans étaient particuliers, admet Cab : ils avaient de l’argent, grâce aux découvertes de gisements de pétrole entre 1900 et 1930. Et ils payaient bien : 15000$ par semaine pour l’orchestre et 10% des recettes au-delà de 70000$ par semaine.
A cette occasion, l’orchestre voyageait en train Pullman spécialement affrété. Seuls quelques orchestres blancs en faisaient de même. Pourtant, durant cette tournée au Texas, la plupart des musiciens logeait parmi la communauté noire.
Cab se remémore une autre tournée, en 1939 au Texas durant laquelle ils eurent à souffrir directement de la ségrégation. Nous avons déjà consacré une note à cette histoire de Longview et à cette autre émeute à Memphis, Tennessee.

Reefer Man

Pour terminer ce long chapitre, Cab laisse la parole à Milt HINTON, son contrebassiste et fidèle ami. Il se souvient que c’est en 1936 qu’il rejoignit l’orchestre à Chicago alors qu’Al MORGAN, le contrebassiste depuis les Missourians avait décidé de quitter la vie trop rythmée du show-business pour partir s’installer en Californie. On indiqua alors à Cab un jeune contrebassiste qui jouait aux Three Deuces dans l’orchestre de Zutty Singleton.
Après l’avoir écouté, Cab parla de Milt avec son chez Singleton. Quelques minutes plus tard, Cab proposa à Milt de rejoindre son orchestre dès le lendemain. Pour Milt, c’était l’occasion du siècle ! Comme convenu, il retrouva tout le monde dans le train le lendemain matin. Le soir même, ils jouèrent en public, sans permettre à Milt de faire une répétition. Pour l’aider, le pianiste Benny Payne lui soufflait les accords au fur et à mesure. Soudain, Cab annonça le morceau sur lequel la basse était la vedette, Reefer Man. Mais Milt avait passé des heures à écouter le solo d’Al Morgan au point d’être capable de le jouer lui-même. Quand son moment fut venu, Milt Hinton réussit son coup et fut salué par Cab et les autres musiciens. En 15 ans de présence dans l’orchestre de Cab, ce fut le meilleur souvenir de Milt !


Cab Calloway, Of Minnie The Moocher And Me
Dans le prochain chapitre,
LIFE WITH THE BAND,

nous verrons la vie de l'orchestre, notamment à travers le commentaire de
Benny Payne, le fidèle pianiste de Cab Calloway.

 

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