“Stormy Weather” and the french critics

A cause de la guerre, Stormy Weather n'est sorti en France qu'en juillet 1946, soit 3 ans après les Etats-Unis. Entre les deux, le jazz avait déjà bien changé : Fats était mort et Cab commençait déjà largement à peiner pour faire vivre son big band. Pourtant, une fois n'est pas coutume, la critique française fut élogieuse.


Critique signée Pierre ARTIS et parue dans Jazz Hot, septembre-octobre 1946 :

« Les fans parisiens se souviendront lonftemps de ces mémorables journées d’été où plusieurs fois par jour apparaissaient sur l’écrain d’un cinéma des Champs-Elysées, dans un enthousiasme délirant, tant de visages noirs si sympathiques, ceux si familiers de Bill Robinson, Fats Waller, Zutty Singleton, Cab Calloway ; ceux que « Stormy Weather » apprennent à connaître, Ada Brown, les Nicholas Brothers et le Tramp Band ; ceux des dizaines de girls et de boys annymes dont chaque pas de danse vaut plus que toutes les savantes figures d’un quelconque Fred Astaire international… Soirées inoubliables dont le souvenir du piano de Fats, du blues chanté par la grosse Ada, des acrobaties ébouriffantes des Nicholas, des cris de Cab le « hi-de-h-o-man » appellent encore un écho radieux au cœur de de tous ceux qui surent quitter un soir la dépouille de « l’honnête homme » parfaitement ennuyé du vingtième siècle pour vivre quelques minutes de vie intense scandée par la batterie de Zutty et le tap-dancing de Bill Robinson…
Et qu’importe que Lena Horne soit une chanteuse trop « sweet », que le ballet de Katherine Dunham soit pour beaucoup trop « classique », que le metteur en scène Andrew Stone à la blanche peau ne se soit pas épuisé les méninges pour en tirer quelque originalité !... Les réflexions du bon Fats sont si savoureuses, Cab et ses super-zazous si drôles, et les Nicholas Brothers arrachent les bonnes gens de leurs pauteuils… Mais que tout cela ne fasse pas oublier Bill Robinson ! Il n’a l’air de rien, le vieux Bill, mais lorsque, après avoir répandu le sable de son seau sur le point du bateau il se met à danser au rythme du Tramp Band, il est tout simplement merveilleux. « Cet homme-là, disait un ami, ne marche pas comme les autres »…

 

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La foule sur les Champs-Elysées, faisant la queue à l'Elysées-Cinéma.
On notera que seul Cab Calloway apparaît en titre sur l'affiche
(tandis que c'est Bill Robinson qui est représenté).
(
© Collection LAPI, Roger-Viollet)