Gilles PETARD: jazz as a fireworks!

Quand on a la chance de rencontrer Gilles Pétard, on se dit que l’on n’est qu’un petit amateur de jazz à côté de lui. Tout petit ! Voilà quelqu’un qui depuis toujours s’est passionné pour la musique noire et qui a accumulé une collection sans commune mesure. Nous concernant, c’est surtout grâce à lui que l’on a la chance de pouvoir écouter l’intégrale de l’œuvre de Cab, en tout cas jusqu’en 1955, dans la fameuse collection Chronogical Classics. Mais Gilles Pétard connaît Cab depuis bien plus longtemps…
 
 

Déjà à l'époque des vinyles

Producteur discographique et spécialiste de renommée mondiale sur la musique soul et noire, Gilles Pétard est également un amateur très éclairé de Cab Calloway.

À l’époque des vinyles, Gille Pétard avait déjà produit au Danemark pour le label Official quelques belles rééditions : The Most important Recording et Cotton Club Revue 1958. Le premier était remarquable par sa qualité et la richesse de ses notes de pochette. Le deuxième permettait de rendre accessible un disque très recherché par les collectionneurs.
 
Aussi, lorsqu’il créa la collection Chronogical Classics en 1990, Gilles Pétard n’attendit pas trop longtemps pour entamer une intégrale Cab Calloway, en gardant un bon rythme de parution le concernant. « J’ai toujours aimé sa voix si caractéristique et le fait qu’il ait toujours su s’entourer de brillants solistes. En plus, je suis très attaché au style et Cab en possédait un vraiment remarquable. Tenue, jeu de scène, il était incomparable ! Louis Jordan lui doit beaucoup… Alors, quand j'ai lancé la collection, Cab Calloway s'est vite et tout naturellement imposé rapidement. »

Gilles Pétard a en effet une passion pour les chanteurs noirs, de toutes les époques et de tous les styles : musique sur tous les supports historiques et actuels mais aussi une impressionnante collection de photos lui permettent d’assouvir sa passion. « Rien ne vaut l’écoute d’un 78 tours en conditions réelles : le son a une présence et un rendu uniques », ajoute-t-il.

 

Une édition unique au monde !

Mais c’est en mettant ses richesses à disposition du plus grand nombre que Gilles Pétard est heureux. Pour cela, les quelque 1200 titres de la collection Chronogical Classics en sont l’exemple le plus frappant. Un cas unique dans l’histoire du disque de jazz, envié par le monde entier. Avec au moins 5 parutions par mois, la collection exige un travail colossal qui s’est étendu du jazz au Rhythm and Blues. C’est pourtant une entreprise qui fonctionne avec seulement quelques collectionneurs qui contribuent à la mise en place des œuvres classés par ordre chronologique. « Il faut en moyenne 6 mois pour sortir un album. Le plus long est toujours de rassembler les titres. Nous avons pu mettre jusqu’à 5 ans pour certains ! Par exemple, l’album de Cab, 1947-1955 a été très long à sortir parce qu’il y avait deux chansons sur lesquelles nous ne parvenions pas à mettre la main [NDLR : Got The World On A String et Why Can't You Behave*]. Elles sont bien inscrites dans la discographie mais, apparemment, elles n’ont jamais existé ! Après l’assemblage des titres, il y a beaucoup de relecture et de corrections pour les informations discographiques. »

La prestigieuse Rutgers University est un des interlocuteurs privilégiés de Gilles Pétard. Mais Léon DIERCKX qui collabore depuis toujours à la série est le complice de tous les instants. Collectionneur éclairé, il envoie de Bruxelles la plupart des précieux 78 tours qui seront ensuite remastérisés. D’ailleurs, concernant le son des premiers CD de la collection, Gilles Pétard regrette qu’il soit parfois de piètre qualité. « Les premiers albums de Calloway mériteraient d’être à nouveau remastérisés. J’en ai d’ailleurs le projet. Depuis les années 90, la technique a fait des progrès énormes à ce niveau. Et il faut ajouter que certaines des faces que nous avions pour Cab étaient dans un très mauvais état ! Quand il s’agissait de marques comme Banner qui étaient destinées au public noir, les disques étaient souvent de très mauvaise facture. »

Côté livrets, la collection Chronogical n’a rien à envier à la majorité des éditions disponibles. C’est principalement Anatol SCHENKER qui s’en charge, un Suisse également professeur d’anglais. Pour l’album 1947-1955 de Cab, on constate qu’il n’y a pas ou prou d’informations discographiques : « C’est normal ; il est très difficile d’avoir des renseignements précis sur cette époque. Il n’y a aucunes archives chez Bell, comme chez presque toutes les compagnies de disques dans les années 30. »

Le travail d’édition sur Cab Calloway est désormais terminé dans la collection Classics : « On est allés aussi loin qu’on le pouvait par rapport à la gestion des droits d’auteurs. Il faudrait donc attendre plusieurs années avant de pouvoir sortir un album couvrant une période plus récente. En plus, à part quelques faces, ce sont des faces sans grand intérêt. »

En tout cas, on ne pourra jamais assez remercier et saluer Gilles Pétard pour l’immense travail accompli, en particulier sur Cab Calloway. Grâce à lui, j’ai pu avoir le frisson de la découverte – comme vous sans doute – d’énormément de titres jusqu’alors indisponibles et enfin proposés aux oreilles attentives des amateurs de jazz.

 


Jazz Magazine n°506 (juillet-août 200) a consacré une longue interview de Gilles Pétard, Léon Dierckx et Anatol Schenker et Kurt Mohr. Indispensable pour connaître tous les rouages de la collection Chronogical.

  • La plupart des titres de Cab Calloway parus dans la collection sont disponibles dans toutes les boutiques en ligne et chez quelques disquaires.
  • Toute la collection Chronogical va être progressivement disponible chez ABEILLE Musique qui est son nouveau distributeur. Prochainement, les 3000 titres seront téléchargeables directement sur le site.
*Respectivement Signature 2072 et 2073, enregistrés le 5 mai 1949
blog comments powered by Disqus